LE CORPS DE L’INSPECTION DU TRAVAIL EST ABANDONNE !

 

Ministère, DRH, organisations syndicales, s’il y a bien un diagnostic partagé, c’est que le corps de l’inspection du travail n’attire plus. L’analyse des causes, elle, n’est pas partagée : manque de communication pour les uns, détériorations des conditions de travail pour les autres.

Pour FO TEFP, si ces deux raisons participent à la désaffection de nos métiers, les questions d’attractivité financière et l’absence de déroulé de carrière en sont les principales causes.

Autrefois qualifié de corps prestigieux, voire de « magistrature sociale », qu’est devenu le corps de l’inspection du travail ? Notre corps est victime d’un abandon complet.

 

UNE GRILLE INDICIAIRE TRES INSUFFISAMMENT REVALORISÉE

Suite aux annonces de revalorisation du corps de l’inspection du travail, voici ce que nous écrivions suite au comité technique ministériel du 2 décembre 2021 :

« Pour la revalorisation de la grille du corps de l’inspection du travail : le budget accorderait gracieusement 33 points d’indices répartis sur les 5 premiers échelons, une réévaluation du dernier échelon du grade des directeurs adjoints de 24 points et quelques réductions d’ancienneté dans certains échelons le tout pour le deuxième semestre 2022 SANS AUCUNE CERTITUDE et c’est comme ça que les pouvoirs publics comptent augmenter l’attractivité du corps ! 1,6 million d’euros sont budgétés pour cet hypothétique projet très incertain et qui confine à la sinistre farce ! »

Soyons clairs : l’administration s’est moquée des membres du corps de l’inspection du travail et la grille indiciaire de notre corps n’est plus attractive du tout. Comment attirer des jeunes finissant leurs études avec un Bac+5 alors que les autres corps présentant de fortes technicités – et même ceux qui en ont moins – proposent de meilleures conditions ? Sans parler du secteur privé !

 

UN REGIME INDEMNITAIRE TRES INFERIEUR AUX CORPS ADMINISTRATIFS ET TECHNIQUES

Au problème de la grille indiciaire, s’ajoute la question des primes, dont la plus importante est l’IFSE.

Alors qu’une revalorisation de l’IFSE des attachés d’administration de l’Etat (AAE) était nécessaire au regard de la concurrence interministérielle, le corps de l’inspection du travail a été oublié !

Vous trouverez ci-après un tableau récapitulatif de la situation :

 

Comparatif des socles annuels entre les attachés et le corps de l’inspection du travail

Je travaille en

Mon poste appartient au

Socle IFSE AAE

Socles IFSE IT avant la revalorisation

Socles IFSE IT après la revalorisation

Administration centrale

Groupe 1

17.600

13.500

13.500

Groupe 2

15.200

12.300

12.300

Groupe 3

13.800

9.000

10.000

Service déconcentré en Ile-De-France

Groupe 1

17.600

10.120

13.500

Groupe 2

15.200

8.000

12.300

Groupe 3

13.800

7.135

10.000

Service déconcentré (hors-IDF)

Groupe 1

16.000

10.120

12.500

Groupe 2

13.500

8.000

10.600

Groupe 3

12.000

7.135

9.700

 

FO TEFP n’a pas manqué de dénoncer une différence aussi abyssale, alors que nos collègues attachés ne sont pas les mieux traités comparés à d’autres ministères !

Si une revalorisation de l’IFSE du corps de l’inspection du travail a bien été réalisée, celle-ci s’avère encore très insuffisante. Pourquoi un jeune diplômé irait-il passer 18 mois à Marcy-l’Etoile ?

 

UNE STAGNATION DANS LE PREMIER GRADE DU CORPS

A notre connaissance, le corps de l’inspection du travail est le seul corps de la fonction publique où il est impossible d’avoir un déroulé de carrière en conservant ses missions d’inspection. Un comble pour un corps de contrôle !

De surcroît, les réformes multiples, notamment la « DDIsation », ont écarté le corps de l’inspection du travail de nombreux postes d’encadrement. Aussi, il est aujourd’hui de plus en plus difficile pour des inspecteurs du travail inscrits au tableau d’avancement d’accéder au grade de directeur adjoint du travail.

Dans ces conditions, les inspecteurs du travail ont vocation à s’enfermer et à stagner dans le premier grade du corps. Pour FO TEFP, cette situation est inacceptable et nous revendiquons depuis de nombreuses années la possibilité d’accéder au deuxième grade de l’inspection du travail en conservant les missions d’inspection. Après tout, au temps de l’ITEPSA et de l’ITT (respectivement inspection du travail en agriculture et inspection du travail des transports avant la fusion des systèmes d’inspection), cette situation ne posait pas de difficulté…

Pour rappel, vous trouverez ci-dessous le lien vers notre article : DA inspectants, c’est maintenant !

Nous n’avons pas manqué de dénoncer cette situation à de nombreuses reprises auprès de la Direction Générale du Travail qui s’arc-boute sur une position intenable dans les faits : nous sommes le seul corps où des collègues se trouvent au tableau d’avancement sans pouvoir être promus

La mise en oeuvre des nouvelles lignes directrices de gestion en matière de promotion serait l’occasion de rebattre les cartes !

 

Des DA Inspectants pour certains ITD… pas pour les autres !

Face au manque criant d’attractivité du métier, le Ministère du travail a largement ouvert le recrutement à des agents d’autres Ministères, voire d’autres fonctions publiques, venant au passage ponctionner des effectifs dans des services parfois aussi exsangues que les nôtres. En d’autres termes, on déshabille Pierre pour habiller Paul.  

Les inspecteurs ainsi détachés, qui gardent le bénéfice de leur grille indiciaire d’origine, sont parfois mieux, voire bien mieux, rémunérés que ceux du corps lesquels sont pourtant amenés à les former. Certains ITD sont même recrutés au grade de DAT, il est même théoriquement  de les recruter au grade de DT, afin de respecter leur grille indiciaire !

Ainsi, en même temps que l’on refuse le passage des Inspecteurs du Travail au grade de DAT inspectant, on n’hésite pas à intégrer des agents détachés à ce même grade.

Cette situation déjà ubuesque en soi va créer, à terme, des distorsions dans le déroulé des carrières, les agents intégrés à des grades supérieurs étant susceptibles d’accéder plus rapidement que les Inspecteurs du Travail « historiques » à des postes d’encadrement.

FO TEFP avait anticipé cette dérive et alerté en son temps l’Administration en CA de l’INTEFP puis au CTM travail-emploi du 30 septembre 2021. Nous avions demander de limiter l’accès des ITD au premier grade du corps de l’inspection du travail, quitte à devoir refuser des candidatures. C’est donc en pleine connaissance de cause que l’Administration permet à certains, mais pas à tous, de devenir DA inspectants et de mépriser, une fois encore les inspecteurs du travail « historiques ».

FO TEFP tient toutefois à préciser que nous ne blâmons aucunement aux collègues ITD entrés comme directeurs adjoints du travail : l’Administration est la seule responsable de la situation ! Il est tout à fait normal que ces collègues ne soient pas perdants financièrement en arrivant dans nos services.

 

UNE MALTRAITANCE INSTUTIONNELLE DU COEUR DE METIER

L’organisation d’une pénurie d’effectifs au sein des services place nos collègues dans un état de saturation professionnelle (intérims, suppléances, formation des nouveaux arrivants…). Plutôt que de reconnaître et de valoriser cette charge supplémentaire, le ministère ne fait que maltraiter nos collègues. Quid du paiement des heures supplémentaires accomplies mais écrêtées ? Quid d’une quelconque reconnaissance indemnitaire ?

En lieu et place, l’administration réfléchit à des règles qui amplifieront la maltraitance des agents de contrôle, notamment en durcissant les règles de l’IFSE mobilité qui ne serait pas due en cas de changement de secteur de contrôle et en gelant l’IFSE expérience au bout de 13 années sur un même poste. Ainsi, l’expérience acquise par un agent de contrôle, à laquelle l’administration n’hésite pas à faire appel dans ses différents groupes de travail et réseaux, ne serait même plus valorisée ! De quoi faire fuir les « anciens » !

Nous espérons que l’administration ne confirmera pas la mise en oeuvre de tels principes !

 

UN METIER EN CONSTANTE COMPLEXIFICATION

FO TEFP a toujours demandé la mise en place de moyens pour l’inspection tant humains que juridiques, lui permettant d’exercer ses missions avec efficacité. Force est de constater que de nouveaux outils et de nouveaux pouvoirs ont été donnés aux agents de contrôle, leur imposant une plus grande technicité ainsi qu’une plus grande diversité des actions menées (arrêt d’activité, audition pénale libre, sanctions administratives…).

Par ailleurs, les lois travail, dont FO TEFP demande toujours l’abrogation, comme la pluie continue de nouveaux textes en matière de dialogue social, de sécurité, de PSI… ont alourdi et complexifié le conseil aux usagers et certaines thématiques de contrôle.  

Aucun dispositif n’est pourtant mis en oeuvre pour reconnaître l’augmentation de la technicité des membres du corps de l’inspection du travail.

 

L’IMPACT SUR LE SERVICE RENDU AUX USAGERS

Avec plus de 20% de sections d’inspection vacantes depuis de nombreuses années, la qualité du service rendu aux usagers ne peut que fortement se dégrader dans un contexte social où les effets de l’inflation et de la crise sanitaire nécessiteraient au contraire un système d’inspection du travail efficace.

Des salariés se retrouvent sans agent de contrôle depuis parfois plusieurs années. Qu’en est-il de l’égalité républicaine ?

Pour FO TEFP, les premières victimes de cette débâcle organisée sont bien in fine les usagers, notamment les plus précaires.

La multiplication de campagnes et autres grands objectifs nationaux dans une situation de sous-effectifs permanente pèse sur les agents et devient inaudible pour les usagers. A titre d’exemple, FO TEFP serait très curieux du résultat de la campagne précarité réalisée pendant la campagne présidentielle de 2022 : combien de salariés précaires ont obtenu un CDI ?

 

Pour FO TEFP, les choses sont claires : le corps de l’inspection du travail est à bout de souffle et mérite une prise en considération immédiate de la part des décideurs administratifs et politiques se traduisant sur la paye, sur les perspectives de carrière ainsi que sur les conditions de travail des agents.

Nous revendiquons :

       Pas une section vacante, un agent de contrôle pour 5000 salariés

       Une vraie revalorisation de la grille indiciaire du corps de l’inspection du travail

       Un IFSE reconnaissant la technicité unique de notre métier

       Un déroulé de carrière digne : les DA inspectants, c’est vraiment maintenant !

 

       Des lignes directrices de gestion tenant compte des spécificités du métier d’agent de contrôle