Madame la Ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités,
Depuis votre prise de fonction, nous déplorons votre silence face aux interpellations légitimes des organisations syndicales. C’est avec stupeur que nous avons pris connaissance des coupes sombres dans le budget de notre ministère. Ces annonces créent un fort désarroi dans les services. Par ailleurs, des annonces ont été faites par votre prédécesseur, seront-elles mises en œuvre ?
QUEL DEVENIR POUR L’EMPLOI ?
Le décret n°2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits grèvent les budgets du BOP 102 concernant l’accès et le retour à l’emploi de 227 954 579 euros et du BOP 103 concernant l’accompagnement des mutations économiques et le développement de l’emploi de 863 550 472 euros.
Nous notons que le terme « emploi » a disparu du nom de notre ministère. Cette suppression symbolique prend un tout autre sens désormais.
Quelle est votre vision des services emploi ? Quelle est votre vision de « l’État stratège » pour les politiques de l’emploi dans les services ?
Nos collègues n’ont pas qu’un rôle d’animation, mais aussi un rôle de pilotage. Comment piloter sans crédits ?
QUEL DEVENIR POUR L’INSPECTION DU TRAVAIL ?
20% des sections d’inspection sont vacantes. Les départs en retraite sont nombreux du fait de la pyramide des âges Alors qu’il nous avait été annoncé le recrutement de 300 inspecteurs par concours et détachement, seuls 188 postes seront ouverts au titre de l’année 2024. Dans certains départements, cette situation dure depuis plusieurs années. Les collègues sont épuisés, voir purement et simplement dégoûtés par cette annonce.
Pour FO TEFP, si nous pensions qu’il faudrait plusieurs années pour que les intérims structurels disparaissent, nous estimons désormais que la situation ne s’améliorera jamais. Et encore, nous parlons uniquement d’un agent de contrôle pour 10 000 salariés, un ratio très éloigné de nos revendications.
Quelle politique souhaitez-vous voir mener sur le champ travail ? Allez-vous suspendre les objectifs dans les départements en souffrance ? Assumez-vous que l’inspection du travail ne gérera plus désormais que les urgences ? L’inspection du travail doit-elle expliquer comment un salarié est mort au travail plutôt que de prévenir les accidents ?
NOS MISSIONS MÉRITENT-ELLES D’ÊTRE DÉFENDUES ?
Le 25 janvier 2024 à Agen (Lot-et-Garonne), à l’occasion des manifestations d’agriculteurs, après avoir déversé des pneus et jeté des tomates, un sanglier a été pendu et éventré devant les locaux des services de l’inspection du travail dans ce département, action menée semble-t-il en guise de dénonciation de « l’asphyxie administrative des agriculteurs. »
Ces faits, ainsi que l’incendie des locaux de la MSA de l’Aude, nous rappelle des heures sombres : un agent de l’inspection du travail agricole et un agent de la MSA de Dordogne avaient été assassinés il y a 20 ans.
Malgré les demandes des organisations syndicales, ces faits n’ont fait l’objet d’aucune expression publique de votre part.
Vos agents ne méritent-ils pas d’être défendus ? Nos missions régaliennes ont-elles encore une quelconque valeur ? Un agent de contrôle doit-il fermer les yeux si une machine agricole est dangereuse du fait de sa non-conformité ou si un salarié se retrouve sans salaire ? Les agents de contrôle spécialisés en agriculture seront-ils réprimandés si les campagnes de contrôle sont moins suivies en 2024 ?
QUELLE ATTRACTIVITÉ POUR LE MINISTÈRE ?
Les rémunérations dans les ministères sociaux souffrent d’un manque d’attractivité. Si des efforts notables ont été fait en matière d’IFSE concernant les secrétaires administratifs et les attachés d’administration de l’État, aucun bilan de cette harmonisation n’a été transmis aux organisations syndicales malgré les nombreuses relances de notre syndicat.
L’IFSE des adjoints administratifs est indigente. Si d’autres ministères ont plus d’égard, les socles de l’IFSE dans les ministères sociaux confinent au mépris. Le plan de transformation de C en B est quant à lui tomber aux oubliettes.
Concernant le corps de l’inspection du travail, toutes choses égales par ailleurs, l’IFSE des agents est en décrochage complet par rapport à d’autres corps relevant d’autres périmètres ministériels mais également des corps de ce ministère (attachés, IASS).
Nous avions des demandes et souhaitions les discuter en amont. Or, nous apprenons que les arbitrages ont été réalisés (et effectifs sur la paye de février). Si une information est prévue lors du CSA ministériel travail-emploi est prévue concernant un nouveau rebasage du socle IFSE du corps de l’inspection du travail (toujours très éloigné des autres corps), nous constatons l’absence de dialogue social sur la répartition de l’enveloppe des 4 millions d’euros annoncée par votre prédécesseur.
Par ailleurs, FO TEFP revendique toujours une revalorisation de la grille du corps de l’inspection du travail (la précédente revalorisation étant indigente) et de l’intégration de tous les contrôleurs du travail qui le désirent dans le corps de l’inspection du travail comme cela avait été initialement prévu par la réforme dite « Ministère fort ».
Enfin, votre prédécesseur annonçait vouloir engager le dialogue avec les organisations syndicales pour résorber la précarité des contractuels au sein de notre ministère. Cela fait bientôt six mois. Ce sujet est-il encore d’actualité ?
Notre ministère est-il condamné à être celui qui perd systématiquement tous les arbitrages budgétaires ? Notre ministère est-il encore celui du dialogue social ?
Madame la Ministre, si vous avez le droit de garder le silence, notre organisation syndicale peut pratiquer la politique de la chaise vide. L’usage républicain veut qu’un ministre entrant en fonction préside le CSA ministériel. Daignerez-vous présider celui du 7 mars 2024 ?
Si votre absence venait à se confirmer, nous vous informons que nous n’y participerons pas.
Veuillez croire, Madame la ministre, en nos sentiments les meilleurs.
Paris, le 29 février 2024
Copie : Monsieur le SGMAS – Madame la DRH