REMETTRE EN CAUSE LE STATUT DES FONCTIONNAIRES, C’EST RENFORCER L’ARBITRAIRE !

 Le mardi 9 avril 2024, Stanislas Guerini, ministre de la Transformation Publique, a indiqué qu’il voulait « qu’on lève le tabou du licenciement dans la fonction publique » en pleine période de concertations avec les collectivités, les hôpitaux et les syndicats autour de son projet de réforme de la fonction publique, attendu à l’automne. Et sur fond d’austérité budgétaire interdisant toute réelle négociation avec les organisations syndicales (10 milliards de coupes en février 2024, 10 milliards nouveaux le 10 avril 2024 dont 5 milliards sur les budgets ministériels) !

 Le projet présenté aux organisations syndicales met sur la table certaines questions comme la prise en compte des expériences professionnelles passées pour se présenter à un troisième concours, maintenir le niveau de prime en cas de mobilité, la priorisation éventuelle des filières/périmètres les plus en tension (en termes d’attractivité, de transformation des métiers et des compétences associées, de comparabilité avec le marché de l’emploi, de besoin de revalorisation pour des métiers aujourd’hui très féminisés etc.), comment favoriser l’accès au logement dans les zones en tension, ou encore la possibilité de généraliser la possibilité pour l’employeur public de porter plainte à la place de l’agent victime.

 La solution ? La rémunération au mérite !

 Ces pistes de réflexion posent des problématiques réelles, mais les seules solutions actuellement envisagées par le ministère de la Fonction Publique se traduisent par un recul des droits des agents. Le statut général des fonctionnaires est dans le viseur, même si le Ministre Guérini affirme tout le contraire !

 Le ministre n’y va pas par quatre chemins : l’avancement via la rémunération au mérite est la ligne directrice du projet. Il faudrait donc plus de garanties, à savoir notamment l’égal accès aux emplois et la gestion des carrières selon le seul critère des « vertus et des talents ». Ceci pour éviter le favoritisme ou le « clientélisme » .

On croit rêver ! C’est justement la rémunération au mérite qui les amplifie ! Alors que les agents subissent le recul de la mise en œuvre des lignes directrices de gestion et de la perte de compétences des CAP  (plus d’opacité, des textes qui ne s’appliquent que formellement lorsqu’ils sont appliqués), ils comprennent de plus en plus que pour évoluer, c’est de moins en moins le travail qui paye, mais le paraître. Le tout en étant de moins en moins nombreux (pour rappel le ministère du Travail a perdu environ 20 % de ses effectifs en 10 ans).

 Une critique des catégories

 La structuration en catégories administratives (A, B et C) est également dans le viseur. Celle-ci serait en décalage croissant avec les évolutions de l’emploi et des métiers. Pour un gouvernement qui aime tant les entreprises, ce questionnement est étrange : les entreprises distinguent bien dans leur organisation les salariés effectuant des tâches d’exécution, l’encadrement intermédiaire/ les salariés occupant des tâches complexes et les postes de direction.

 Pour FO TEFP, nous ne partageons aucunement ce constat. Par contre, au ministère du Travail, effectivement, il n’y a pratiquement plus de postes correspondant à la catégorie C. La vraie urgence n’est-elle pas de faire passer les agents en catégories C en B, comme cela avait été promis ? Et de mettre en œuvre de façon beaucoup plus massive et ambitieuse que celle annoncée la nomination des Directeurs adjoints inspectant ?

 Une massification à venir des contractuels au détriment de tous

 Le ministre de la Fonction Publique pointe des difficultés dans les processus de recrutement des contractuels. Diagnostic que nous partageons. Pour recruter un contractuel, dans la grande majorité des cas, cela n’est possible que si aucun fonctionnaire ne postule sur l’emploi concerné. Il faut donc publier une offre d’emploi à chaque fin de contrat ce qui est contraignant pour les structures et les services RH.

 Mais le ministre propose-t-il d’augmenter les recrutements par voie de concours pour pourvoir les postes manquants ? Non ! Il se contente de s’interroger sur la nécessité de conserver l’obligation de publication des postes occupés par les agents contractuels dont le contrat arrive à terme avant un renouvellement. En d’autres termes, dans notre ministère, cela se concrétisera d’une part par conserver quelques années un agent contractuel puis le jeter comme un kleenex ou le changer de poste pour ne pas être contraint de le faire passer en CDI, d’autre part, par la réduction des possibilités de mobilité des fonctionnaires. Un projet perdant-perdant !

 Pour FO cette réforme est inacceptable !

 Au niveau des discussions avec les fédérations de fonctionnaires, c’est une vraie mascarade. Monsieur GUERINI veut imposer sa loi de modernisation de la fonction publique dès la fin de l’année, sans même écouter les représentants des agents, nous sommes au-delà du monologue social, un nouveau cap est franchi !

Deuxième syndicat de fonctionnaires, la FGF-FO a ainsi refusé de participer à la réunion du mardi 9 avril, son secrétaire général, Christian Grolier, dénonçant « un ministère qui ne veut pas négocier mais imposer son projet ».

Dans un climat de plus en plus tendu et anxiogène, dû aux politiques publiques désastreuses d’austérité budgétaire imposées à la fonction publique depuis des années, ces annonces constituent le pas de trop franchi par le gouvernement ! Halte au fonctionnaire bashing !

Pour FO TEFP, nous rappelons une fois encore que les problèmes d’attractivité ne sont pas liés au statut de la Fonction publique mais à la chute du pouvoir d’achat des fonctionnaires. L’urgence est là : revaloriser le point d’indice, augmenter les grilles indiciaires, instaurer l’échelle mobile des salaires, ce qui inciterait davantage de jeunes et de moins jeunes à passer les concours !