La semaine de travail en 4 jours : bonne idée ou dégradation en devenir des conditions de travail ?
Le principe est de faire la semaine de 5 jours en 4 jours sans réduction du temps de travail, ni perte de salaire. Le Premier ministre ATTAL, après avoir expérimenté la semaine en 4 jours dans certains services, souhaite généraliser cette expérimentation dans les trois versants de la fonction publique fin 2025. La ville de Lyon mène cette expérience depuis septembre 2023. Les retours des agents de cette ville sont très mitigés puisque les personnels ont plus pointé la charge et l’amplitude de travail que sa flexibilité et ses soi-disant avantages !
Nous pourrions trouver l’idée très séduisante de travailler sur 4 jours et non 5 jours. Toutefois, la différence entre travailler 38h30 sur 5 jours et 38h30 sur 4 jours est énorme : de 7h42 à 9h37 ! Il serait alors nécessaire d’abandonner les 20 journées de RTT ou les réduire très drastiquement. Même en passant à 35 heures sur 4 jours, la journée de travail serait de 8h45 !
Les crèches, les écoles adapteront-elles leurs horaires d’ouverture à ce nouveau rythme ? Sans compter les problématiques liées au vieillissement, de santé comme les maladies chroniques, de proche aidant, et de handicap. Il y aurait naturellement des conséquences sur la vie familiale, sur les conditions de travail mais aussi sur la réorganisation du travail au sein du service et une réduction de jours de télétravail.
Quant à la charge de travail, elle reste la même, augmentant de facto la productivité « horaire » des agents. Les agents à temps partiel, majoritairement des femmes, peuvent en témoigner.
Cette mesure est motivée avant tout par la volonté du gouvernement de répondre à la demande de réduction de la dépense publique. De nombreux articles de presse nous expliquent que les dépenses publiques ont explosé ces dernières années (mais pas les traitements des agents, qui ont perdu 10 % de salaire sur leur régime indiciaire depuis 2020 !).
Cette proposition rend possible des réductions supplémentaires de la surface immobilière de l’État (voir notre tract du 27 mai 2024), des économies d’énergie, la remise en question du travail en présentiel et en distanciel. Sans compter l’émergence des projets dits « tiers lieu », openspaces bien utiles pour fermer obligatoirement un jour par semaine les services publics (c’est un sujet qui serait dans les cartons). Aucun agent ne pourrait se rendre à son bureau, les bâtiments administratifs seraient fermés au public, mais les « récalcitrants » pourraient bénéficier des openspaces le jour de la fermeture obligatoire. Les autres, télétravail obligatoire !
L’administration dans sa note favorise un dialogue collectif en prise directe avec le personnel en lieu et place de ses représentants. C’est la même philosophie qui guide la présentation du projet de loi Fonction publique à propos duquel le ministre GUÉRINI dit s’appuyer sur les réponses directes des agents et les souhaits des collectifs de services public.
Cette note n’a fait l’objet d’aucune discussion au niveau national. C’est scandaleux !
Notre organisation syndicale n’est pas opposée par principe à la semaine de travail en 4 jours mais cela ne doit pas se traduire par une dégradation des conditions de travail et de la santé des agents.
Il faut rappeler que les effets des baisses d’effectifs sont désastreux pour les personnels en termes de santé physique et mentale, l’employeur public a une obligation légale à respecter, adapter le travail à l’homme (principes généraux de prévention, livre IV du Code du travail qui s’applique à toute la fonction publique, article L 4121-2 du Code du travail).
Pour FO TEFP, les dispositifs d’aménagement du temps de travail existants sont déjà suffisants. Les agents peuvent déjà travailler 38h30, 37h30 ou 36h30, ainsi que 36 h par semaine sur 4 jours et demi (ou 4 jours une semaine / 5 jours une semaine). L’instruction interministérielle rappelle d’ailleurs la possibilité aux administrations de tester des modalités différentes comme la semaine sur 4,5 jours en lieu et place de la semaine en 4 jours. Il est à craindre que cette expérimentation devienne à terme obligatoire et que les agents soient contraints de l’adopter.
Pour FO TEFP, la mise en œuvre de ce dispositif ne pourra être qu’une modalité supplémentaire d’aménagement du temps de travail au choix de l’agent avec une durée de travail hebdomadaire de 35 heures sans RTT.
FO TEFP est prête à discuter des modalités de la semaine de 4 jours (et non en 4 jours) sur la base d’une baisse de la durée hebdomadaire de travail à 32 heures. Ce ne serait que justice : le ministère du Travail a perdu 20 % de ses effectifs en 10 ans alors que nos rémunérations ne suivent même pas l’inflation ! 4 agents font désormais le travail de 5 agents !